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Conquérir l'inconnu (Greg)

Conquérir l'inconnu

C’est un besoin pour l’homme civilisé de proportionner ses connaissances et ses jouissances à la capacité de son entendement et à l’étendue de ses désirs. Le navigateur, en avançant, découvre de nouvelles productions utiles à l’humanité ; il détermine les divers points du globe, et assure sa route et celle des autres ; il apprend à juger ses semblables par un plus grand nombre de rapports, et chacun de ses progrès est un nouveau pas vers la connaissance de l’homme et de la nature. Il est grand, il est beau de faire ainsi des dépenses et de courir des risques pour les besoins de la société entière et l’accroissement des vraies richesses.

Frontispice de l’Instauratio Magna de Francis Bacon
Frontispice de l’Instauratio Magna de Francis Bacon

(1620)
La légende latine signifie « nombreux seront ceux qui traverseront, et le savoir en sera augmenté »

© Wikimedia Commons

Dans la préface qu’il adresse au lecteur des mémoires laissés par La Pérouse, le rédacteur, Destouff de Milet de Mureau, rend ainsi hommage à l’entreprise qui a coûté la vie au capitaine et à son équipage, soulignant la nécessité et la noblesse de l’exploration du monde, telle qu’elle enthousiasme l’Europe à la fin du XVIIIe siècle. Sur la même page, on le voit opérer une distinction entre les « expéditions entreprises dans des vues ambitieuses et intéressées », aux effets souvent pernicieux, et les « voyages de découvertes, qui ont eu pour objet de porter des bienfaits aux peuples, et d’agrandir le champ de la science ».

Seuls les seconds, bien sûr, méritent les louanges et l’intérêt du public, à proportion de leur participation aux progrès du savoir universel. Plusieurs siècles après ces grandes expéditions, cette distinction continue de structurer nos représentations de l’exploration de la Terre. Mais la connaissance du monde que se mettent à amasser les bibliothèques européennes à partir de la fin du Moyen Âge n’est-elle vraiment que le fruit de recherches pures et désintéressées ?

La curiosité dont la génération des Lumières fait un attribut essentiel de l’« homme civilisé » a elle-même une histoire, qu’historiens et historiennes des sciences ont entrepris d’écrire après s’être aperçus que la construction du savoir n’a que rarement, au cours des siècles, souffert l’isolement qui pour nous fait, ou peut-être déjà faisait, la dignité de la science.

Parce que des voyageurs de l’époque moderne, quelles que soient leur identité sociale et leurs motivations, ont souhaité recueillir et diffuser les informations qui leur semblaient dignes d’intérêt, leurs récits constituent une précieuse pierre de touche de cette évolution des critères et des raisons de la curiosité.

La documentation du lointain implique un certain degré de conscience de l’inconnu, et la volonté de réduire cet inconnu au connu. Aussi tout voyage qui s’apparente à une exploration repose-t-il nécessairement la question des limites du savoir de la société d’appartenance du voyageur, et celle de sa façon d’élaborer des connaissances en général. Ici l’identité de savant des auteurs importe moins que la place que leurs ouvrages viennent occuper sur les rayons des bibliothèques, leurs informations sur les mappemondes encore largement lacunaires, et leurs descriptions dans les connaissances, les goûts et l’imaginaire des lecteurs sédentaires.

La bibliothèque patrimoniale du Centre Culturel Irlandais, grâce à l’ancienneté de sa collection et aux ouvrages à la fois marquants et aujourd’hui fort rares qu’elle possède, offre ainsi la possibilité de voyager dans l’espace, de la Terre sainte à la mer de Corail en passant par le grand Nord canadien, mais aussi à travers le temps, en évoquant les diverses motivations, les diverses identités de voyageurs, qui ont successivement contribué à la conquête de l’inconnu.

Gravure représentant les animaux de la Terre sainte
Gravure représentant les animaux de la Terre sainte

Bernhard von Breydenbach, Opusculum sanctarum peregrinationum... (1502)

© München, Bayerische Staatsbibliothek

Gravure extraite de la China illustrata d’Athanasius Kircher (1667) représentant la façon d’écrire (modus scribendi) des Chinois.

© Österreichische Nationalbibliothek

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